Lettre 22 – février 1997 – Passion – FRANCAIS
« Frissons. Ah ! ce but de François Omam-Biyik ! C’était en Italie lors du match entre le Cameroun et l’Argentine, en ouverture de la première Coupe du Monde à laquelle j’ai assisté. Quand je repense à l’hymne de ce petit pays, le Cameroun, qui allait être entendu par des millions de personnes à travers le monde… et ce but de la victoire sur le pays tenant du titre ! J’en ai encore des frissons. C’était une folie indescriptible, irréelle ! On parle beaucoup des gens qui se tabassent, mais on oublie les milliers de fans de foot, toutes les semaines dans les tribunes du monde entier, qui chantent, qui s’embrassent. Au tennis, on ne connaît cela qu’une fois de temps en temps en finale de Coupe Davis… |
Le football tient une place énorme dans ma vie ! Si je suis ici c’est grâce à ma mère qui était passionnée de ce sport et surtout très amoureuse de l’arrière droit de Sedan ! Mon père a arrêté sa carrière très tôt, en 1963, en raison d’une fracture au bassin, je ne l’ai donc jamais vu jouer.
Copains. Au Cameroun, on passait notre temps à jouer au foot avec les copains – là-bas, tous les enfants jouent au foot dès qu’ils savent marcher – et puis on supportait l’équipe du Canon Yaoundé. En famille par contre, nous pratiquions plutôt le tennis et cela m’arrangeait car, comme j’étais à peu près le seul môme à jouer au tennis j’étais tout de suite le meilleur.
Frustration. Ensuite, lorsque j’étais pro au tennis, j’étais très frustré de ne pouvoir jouer au foot à cause des risques de blessures, des assurances, etc. Depuis, j’en profite et j’adore ça. Je joue avec le Variétés Club de France, une équipe composée essentiellement d’anciens internationaux français tels que Platini, Giresse, Fernandez…
Sur le terrain. Et à chaque fois, c’est un grand bonheur et un grand honneur. Je suis sur le terrain avec des mecs qui m’ont fait rêver et vibrer ! C’est fantastique ! En plus, je joue aussi avec des copains du tennis et du rugby. On fait des matches incroyables. C’est vraiment un bon moyen de garder la forme en se marrant et surtout c’est un formidable sport pour se faire des amis.
Universel. Je me souviens notamment de mon dernier voyage au Mexique. Nous débarquons sur la place d’un village, un match de foot s’organise, je demande si je peux jouer. D’où tu viens ? Cameroun. Ah ! Roger Milla ! Viens jouer. Et c’est parti ! C’est vraiment un langage universel.
Mon premier souvenir de Coupe du Monde, je crois que c’était lors des vacances d’été en 1970. Nous étions en voiture avec mon père. Nous nous sommes arrêtés dans un café routier pour voir à la télé ce formidable match Brésil-Angleterre. C’était même la première fois que je voyais un match à la télé. Les Brésiliens sont vite devenus mes idoles. C’était une autre planète que le Canon Yaoundé et ses terrains en stabilisé. Et pourtant il y avait des joueurs incroyables au Cameroun, dont l’avant-centre, Léa. Le seul joueur que j’ai vu dribbler le gardien puis l’attendre afin de le dribbler une seconde fois avant de marquer !
Télé. Par la suite, j’aurais rêvé de supporter l’équipe de France en 1982, à Séville, en demi-finale contre l’Allemagne. Seulement, nous avions un quart de finale de Coupe Davis à disputer le lendemain contre la Tchécoslovaquie de Lendl. C’est incroyable comme on peut se rendre malade en regardant un match de foot à la télé. Je n’avais pratiquement pas dormi de la nuit. Le lendemain, nous sommes arrivés complètement vidés sur le court. Mais, heureusement, on les a battus. »