Lettre 25 – mai 1997 – Passion football – FRANCAIS

“Plus que tout dans ce sport que je n’ai jamais pratiqué, c’est la précision du geste qui me fascine Pour moi, par exemple, une transversale d’un bout à l’autre du terrain qui parvient dans les pieds d’un avant-centre, c’est la perfection, une performance qui paraît anodine mais qui demeure une grande énigme à mes yeux.

De par ma fonction, j’apprécie l’esthétique du football. D’une manière générale, l’effort est à la fois très beau et très dur. Voir un homme courir -ou une femme d’ailleurs- c’est fantastique. La course, pour moi qui suis toujours très attentivement les Jeux Olympiques, c’est primordial. Dans le foot, la course est belle, à la fois légère et brutale.

Lorsque je suis devant ma télévision, je hurle, je crie, parce que je trouve qu’il y a une espèce de passion folle autour de ce ballon. C’est presque hystérique. Où que l’on se trouve, quand il y a une rencontre capitale, les rues sont désertes. C’est une passion qui anime tout le monde. Elle rassemble une communauté incroyable. Dans un stade, les gens hurlent ensemble, vibrent, s’embrassent, pleurent ensemble. C’est totalement surprenant. Et c’est cette harmonie entre les hommes qui est ahurissante.

Je préfère assister à un match télévisé, mais j’ai tout de même vu une dizaine de matches dans ma vie dans les stades. C’est très prenant. On ne se rend jamais compte à quelle point on crie avec les autres spectateurs, à quel point on vit totalement le match. On est complètement passionné et puis, tout à coup, on s’abstrait parce que le jeu se bloque. Je me dis très rapidement que les joueurs sont nuls, qu’ils ne font pas les bons choix… J’ai presque envie de rentrer sur le terrain, oubliant combien ce sport doit être difficile.

Je ne connais pas beaucoup de noms de joueurs car je ne les retiens jamais. Mais j’aime beaucoup Loko, Cantona bien sûr, et surtout Ronaldo, que je trouve beau comme un dieu. D’ailleurs, d’une manière générale, je trouve tous les joueurs beaux.

J’aime les vêtements du foot. Je trouve que ces tenues sur ces hommes sont généralement belles. Les polos, les rayures, les numéros, ce sont des accessoires que j’apprécie. J’aimerai beaucoup redessiner une tenue d’une grande équipe. Je ne ferai pas vraiment quelque chose de fondamentalement différent, mais en ajoutant -ou en enlevant je ne sais pas- un élément, on peut donner une autre nature à ce prêt-à-porter. Ca m’amuserait beaucoup…

La Coupe du Monde en France, ça m’évoque des soirées terribles, des soirées chaudes, lourdes, où l’on va souffrir devant la télé ou dans les stades. Il n’y aura plus de dîner, plus d’horaires, on ne va parler que de cet événement, de ces matches, de ces joies et de ces déceptions. C’est tellement bien de parler et d’entendre parler de sport dans ce monde bouleversé dans lequel on vit.

Tout est lié à la mode. C’est un état, une culture qui vit, qui existe par rapport à la politique, le sport, la littérature, la peinture, les musées, le ciel, les arbres, la vie en somme. La mode est un déclic, une pulsion. C’est évident que le sport en fait partie. Il suffit d’un mouvement de joueur, dans la lumière d’un rayon de soleil, d’un geste pour que quelque chose se déclenche en nous… “